Les amphibiens (grenouilles, crapauds, tritons et salamandres) sont considérés comme de précieux indicateurs de la qualité des milieux naturels, notamment aquatiques. Ceci, d’une part en raison de leur mode de vie qui nécessite une eau de bonne qualité et, d’autre part, du fait de leur faible capacité de déplacement qui les rend très sensibles aux changements climatiques et à la fragmentation des milieux.
Richesse spécifique et niveau de rareté
En France, 35 espèces d’amphibiens sont présentes, parmi lesquelles 8 sont menacées d’extinction et 12 sont quasi menacées.
La moitié des espèces présente donc un niveau de menace à l’échelle nationale, comme l’indique la liste rouge nationale des amphibiens menacés.
NB: Depuis la rédaction de cette fiche, une liste rouge des amphibiens de Normandie a été publiée en 2022. Pour y accéder : c’est ici !
En Normandie, 18 espèces sont actuellement recensées parmi lesquelles il faut distinguer une espèce, la Grenouille rieuse, qui a été introduite sur le territoire normand.
A ce jour, l’analyse des données disponibles au niveau régional a permis à l’OBHEN, structure de référence sur cette thématique, pilotée par l’URCPIE de Normandie, de définir que 29 % des espèces présentes en Normandie sont assez rares à très rares. Cela représente 5 espèces : le Pélodyte ponctué, le Triton crêté, le Triton marbré, l’Alyte accoucheur et le Crapaud calamite.
Retrouvez, sur ce lien, le descriptif de chaque espèce.
Ces analyses ont également permis de faire ressortir des spécificités départementales :
A cette échelle, 9 des 17 espèces normandes présentent un statut de rareté. L’Eure est le seul département qui héberge trois espèces très rares ; Le Calvados et l’Orne en hébergent deux et la Seine-Maritime n’en héberge qu’une. La Manche, quant à elle, ne présente aucune espèce très rare. Elle présente toutefois le plus grand nombre d’espèces rares des 5 départements normands.
Au vu des données disponibles à ce jour, deux secteurs de Normandie semblent héberger un nombre très important d’espèces : le littoral occidental de la Manche et la vallée de Seine. Trois autres secteurs ressortent également : le bocage ornais, le nord du Pays d’Auge et le Pays de Bray.
Les secteurs de champs ouverts semblent les plus pauvres (Pays de Caux, plateau du Neubourg, plaine de Saint-André).
Quelles évolutions pour les amphibiens en Normandie ?
Au niveau régional, l’analyse des données disponibles montre que les aires de répartition des espèces évoluent au cours du temps. Pour certaines elles régressent, tandis que pour d’autres, elles augmentent. Ainsi, 50 % des espèces normandes (soit 9 espèces) ont connu une régression importante de leur aire de répartition entre 1900 et 1998.
Parmi elles, une espèce a complètement disparue du territoire normand : le Pélobate brun. Et quatre espèces ont connu une régression extrême à forte : le Sonneur à ventre jaune, le Pélodyte ponctué, le Crapaud calamite et le Triton crêté.
Il s’agit principalement d’espèces qualifiées de pionnières, spécifiques des milieux instables comme, par exemple, des bras morts de rivières ou des hauts-fonds. La disparition de ces milieux est due à d’importantes pressions : artificialisation des fonds de vallées, déclin du nombre de prairies lié aux changement de pratiques agricoles, etc., ce qui provoque la raréfaction des espèces qui y vivent.
En Normandie, deux départements sont particulièrement touchés par la disparition d’espèces. Il s’agit de l’Eure et de la Seine-Maritime sans pour autant que les 3 autres départements normands ne soient épargnés.
Néanmoins, certaines espèces, certes moins nombreuses, présentent une expansion de leur aire de répartition. Il s’agit, par exemple de la Rainette verte et de la Grenouille agile.
Outre ces évolutions géographiques, nous pouvons mesurer la dynamique des populations sur l’ensemble du territoire régional, ceci grâce à la réalisation, depuis 2007, de suivis scientifiques par l’OBHEN.
Les résultats de ces suivis permettent d’affirmer qu’à ce jour, 21 % des populations d’amphibiens ont disparues en Normandie au cours des 10 dernières années.
Ces résultats montrent également que certaines espèces, devenues très rares, comme le Pélodyte ponctué ou le Crapaud calamite, présentent une stabilisation de leurs effectifs car, à ce jour, la plupart des populations de ces espèces se trouvent dans des espaces naturels protégés.
D’autres espèces présentent des diminutions d’effectifs alarmantes de plus de 50%. C’est le cas du triton ponctué et de la grenouille rousse.
Enfin, l’évolution de certaines espèces semble être impactée par les changements climatiques en cours. En effet, des espèces d’affinité septentrionales-orientales (présentes plus fréquemment au Nord-Est de la France) semblent plus fragiles que celles d’affinités méridionales-occidentales (c’est-à-dire du Sud-Ouest de la France).
Exemple : les populations de tritons ponctués (espèce d’affinité septentrionales-orientales) diminuent de 58% tandis que celles de la grenouille agile (d’affinités méridionales-occidentales) augmentent de 45%.
Les données de cette page sont issues du programme scientifique national POP Amphibiens.
Comment aller plus loin ?
A ce jour, l’état des connaissances sur les amphibiens est globalement satisfaisant à l’échelle de notre région. Toutefois, il est important qu’il soit actualisé de façon régulière pour ne pas surestimer la régression des populations. Certains secteurs doivent également faire l’objet d’une attention particulière car ils restent, à ce jour, peu voire mal connus. L’acquisition de connaissance sur ces secteurs semble donc prioritaire.
Le déclin des amphibiens est multifactoriel : artificialisation des espaces naturels et agricoles, intensification des pratiques agricoles, changements climatiques, introduction d’espèces exotiques envahissantes, etc.
Il est possible d’agir pour enrayer cette tendance, à différents niveaux, pour leur venir en aide :
Créer et développer des secteurs protégés pour permettre aux populations de se développer sans être soumises à de nombreuses pressions.
Restaurer ou créer des habitats favorables à l’accueil des amphibiens (par exemple par la création de petites mares).
Participer à des programmes de sciences participatives pour aider les naturalistes à inventorier les espèces (exemple en Normandie).
Limiter au maximum la régression et la dégradation des zones humides et du bocage.
Pour en savoir plus, téléchargez la fiche complète de notre collection l’état des lieux des connaissances naturalistes régionales consacrée aux amphibiens.