État écologique des masses d’eau de surface

État écologique des masses d’eau de surface

Le bon état écologique des masses d’eau de surface correspond à un bon fonctionnement des écosystèmes du milieu aquatique. Ainsi, pour être définie comme « en bon état écologique », une masse d’eau doit être à la fois en bon état biologique, en bon état physico-chimique et ne pas dépasser des valeurs seuils pour certains polluants spécifiques.
Les masses d’eau de surface ou masses d’eau superficielles décrites ici, désignent toutes les masses d’eau de type cours d’eau, plans d’eau côtière et de transition (estuaire par exemple). Ces termes englobent aussi bien les masses d’eau naturelles que les masses d’eau artificielles ou les masses d’eau fortement modifiées. Enfin, il est important de préciser que pour être en bon état global, une masse d’eau doit être à la fois en bon état chimique et en bon état écologique.

Chiffres clés – Etat des lieux 2019

  • 42 % des masses d’eau de surface* sont en bon ou très bon état écologique d’après l’état des lieux de 2019** en Normandie.
  • 30 % des masses d’eau normandes, soit 190 sur les 629, sont projetées en bon état écologique pour 2027.
  • 55 % des masses d’eau à risque pour 2027 sont susceptibles de ne pas atteindre l’objectif environnemental du fait d’une seule pression (principalement l’hydromorphologie), soit 241 masses d’eau sur les 439 à risque.
  • 124 masses d’eau aujourd’hui en bon état écologique sont « en risque 2027 » à cause du maintien ou de l’accroissement de l’effet des pressions.

*masses d’eau cours d’eau, plans d’eau, côtières et de transition
**état écologique évalué sur la période 2015-2017 pour la majorité des masses d’eau

Vallée de la Charentonne (27) – Photo R. MATTON
La Normandie se trouve sur deux bassins hydrographiques: Le bassin Seine-Normandie couvre la majeure partie de la superficie du territoire (89 %) et le bassin Loire-Bretagne (11 %) occupe une grande partie du sud de l’Orne et une plus faible partie du sud de la Manche.
Des objectifs au niveau Européen – la DCE !
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La Directive Cadre sur l’Eau (DCE) du 23 octobre 2000 fixe des objectifs au niveau européen de protection, de gestion et de préservation de l’eau. Elle préconise pour l’ensemble des eaux de surface l’atteinte du bon état des eaux en 2015, sauf en cas de report de délai ou de définition d’un objectif moins strict.

Les principaux textes en vigueur pour une gestion durable de l’eau

Des objectifs fixés au niveau des bassins – les SDAGE!
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Les Schémas Directeurs d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) fixent le niveau d’ambition pour chaque bassin et définissent les grandes orientations et priorités pour parvenir aux objectifs.

Les objectifs d’atteinte du bon état écologique prévus dans les SDAGE 2010-2015 des bassins Seine-Normandie et Loire-Bretagne n’ont pas été atteints et des reports de délai sont prévus jusqu’en 2027.
Ces objectifs étaient l’atteinte du bon état écologique pour 69 % des masses d’eau de surface continentales (cours d’eau et plans d’eau) et pour 54 % des masses d’eau côtières et de transition pour le bassin Seine-Normandie et l’atteinte du bon état écologique pour 61 % de toutes les masses d’eau de surface (cours d’eau, plans d’eau, côtières et de transition) pour le bassin Loire-Bretagne.
Les nouveaux SDAGE 2022-2027 seront adoptés par les Comités de Bassin pour définir ces nouveaux objectifs à atteindre pour 2027.

Etat écologique des eaux superficielles de Normandie (état des lieux 2019)

  • 1 seule masse d’eau côtière est en très bon état écologique (Cap de la Hague Nord);
  • Les masses d’eau cours d’eau, plan d’eau du Calvados, de l’Orne et de la Manche sont majoritairement en bon état écologique au niveau des forêts et des secteurs de prairies ou de polyculture-élevage et en moins bon état au niveau des zones de grandes cultures comme la plaine de Caen ou dans l’Orne, au niveau de secteurs qui sont passés de l’élevage traditionnel à une production de grandes culture;
  • Pour la Seine-Maritime et l’Eure, les états écologiques sont moyens à mauvais le long de la Seine et des secteurs fortement industrialisés comme au niveau du Havre ou de Rouen.
52%

des masses d’eau côtières et de transition sont en bon ou très bon état écologique en Normandie

Littoral Seine-Maritime
Littoral de la Seine-Maritime (Photo: A. Dudouble)
42%

des masses d’eau cours d’eau, plan d’eau sont en bon ou très bon état écologique en Normandie

La Risle dans l’Eure (Photo: R. Matton)
Liens entre pressions et état des masses d’eau
L’état global d’une masse d’eau peut être dégradé du fait de nombreuses pressions, que ce soit par contamination directe du milieu (rejets des collectivités ou des sites industriels, apports diffus agricoles) ou bien par destruction du milieu (prélèvement de la ressource en eau, obstacles à l’écoulement, altérations de la forme de la rivière). Pour être en bon état global, une masse d’eau doit être à la fois en bon état chimique et en bon état écologique. C’est à ce dernier que nous nous intéressons dans cette analyse.

Comparaison de l’état écologique des eaux superficielles de Normandie par département ( état des lieux 2019)

Bien que les départements ne soient pas la meilleure échelle pour faire des analyses sur les masses d’eau, on remarque que la Manche, le Calvados et la Seine-Maritime ont un plus grand pourcentage de masses d’eau en bon ou très bon état écologique que l’Orne et l’Eure!

Concernant la Seine-Maritime, ces bons résultats ne reflètent pas systématiquement le meilleur état de ses masses d’eau mais sont liés à la présence d’une table calcaire sur la quasi-totalité de la superficie du département, ce qui entraîne l’utilisation de l’IBG-DCE plutôt que l’I2M2 comme indice appréciant la qualité écologique des cours d’eau à partir de l’étude des macro-invertébrés benthiques.

Normandie (terre) prend en compte les masses d’eau cours d’eau et plans d’eau.
Normandie (mer) prend en compte les masses d’eau côtières et de transitions.
Les départements prennent en compte les masses d’eau cours d’eau et plans d’eau
Sources : AESN, Etat des lieux 2019, 2019 – AELB, Etat des lieux du bassin Loire-Bretagne établie en application de la directive cadre sur l’eau, 2019 ; Réalisation : ANBDD, 2020

Comparaison de l’état écologique des eaux superficielles de Normandie par bassins hydrographiques (état des lieux 2019)

43%

des masses d’eau superficielles de Normandie qui appartiennent au bassin Seine-Normandie sont en bon ou très bon état écologique (31% sur l’ensemble du bassin)

31%

des masses d’eau superficielles de Normandie appartenant au bassin Loire-Bretagne sont en bon état écologique (24% sur l’ensemble du bassin)

Cette situation, plus favorable à l’échelle de la région par rapport au niveau des bassins hydrographiques, est un atout écologique pour lequel il convient de poursuivre les efforts car il persistent d’importantes pressions (agglomérations, industries, grandes cultures…). Ces chiffres sont toutefois à relativiser car la Normandie ne possède qu’une seule masse d’eau en très bon état écologique sur les 37 masses d’eau superficielles en très bon état écologique présentes à l’échelle des 2 bassins hydrographiques.

Paramètres écologiques responsables du déclassement (état des lieux 2019)

Les paramètres déclassants de l’état écologique sont ceux pour lesquels l’état n’est pas bon, c’est-à-dire moyen, médiocre ou mauvais. Une masse d’eau peut être déclassée par plus d’un paramètre si plusieurs paramètres mesurés sont moyens ou moins bons.

Paramètres déclassants les plus fréquents pour les masses d’eau cours d’eau:

  1. Indice biologique diatomées (paramètre biologique)
  2. Phosphore total (paramètre physico-chimique)
  3. Carbone organique dissout (paramètre physico-chimique)

38% des masses d’eau cours d’eau sont déclassées par les paramètres biologiques (36% par des paramètres physico-chimiques et 11% par des polluants spécifiques)

Paramètres déclassants les plus fréquents pour les masses d’eau plan d’eau:

  1. Arsenic (polluant spécifique)
  2. Indice planctonique (paramètre biologique)

82% des masses d’eau plan d’eau sont déclassées par des paramètres biologiques (55% par des paramètres physico-chimiques et 55% par des polluants spécifiques)

Sur les 11 masses d’eau plan d’eau de Normandie, une seule est naturelle.

Paramètres déclassants les plus fréquents pour les masses d’eau côtières:

  1. Blooms de macro algues (paramètre biologique spécifique aux masses d’eau côtières et de transition)
  2. Azote inorganique dissous (paramètre physico-chimique)

25% des masses d’eau côtière sont déclassées par des paramètres biologiques (10% par des paramètres physico-chimiques)

Paramètres déclassants les plus fréquents pour les masses d’eau de transition:

  1. Paramètre poisson (paramètre biologique spécifique aux eaux de transition)

86% des masses d’eau de transition sont déclassées par des paramètres biologiques (29% par des paramètres physico-chimiques)

Synthèse sur les paramètres déclassants :
Les paramètres compromettant le bon état écologique en Normandie sont majoritairement des paramètres biologiques (39 % des masses d’eau normandes) mais restent variés. Le dérèglement atteignant ces paramètres, biologiques notamment, témoigne d’importantes pressions pesant sur les milieux aquatiques en général et plus spécifiquement sur la biodiversité aquatique. Ces pressions peuvent être très variées, allant des rejets des collectivités ou des sites industriels à l’altération de la forme des rivières en passant par les prélèvements de la ressource en eau. L’état des lieux 2019 vise entre autre à identifier les pressions majeures à l’origine du risque de non atteinte des objectifs environnementaux en 2027.

Risque de non atteinte des objectifs environnementaux

L’évaluation du risque de non atteinte des objectifs environnementaux (RNAOE) à l’horizon 2027 pour une masse d’eau donnée se base sur la projection des pressions significatives* en 2027, en tenant compte de l’évolution prévisible des pressions sur les milieux (par exemple, l’augmentation de la population) et des actions déjà engagées ou terminées par les maîtres d’ouvrage.

*Une pression est dite significative si son impact est à l’origine d’une dégradation de l’état de la masse d’eau.

27%

des masses d’eau normandes sont projetées en bon état en 2027 (soit seulement 167 des 629 masses d’eau de la région)

70%

des masses d’eau sont identifiées comme étant en risque de non atteinte des objectifs 2027 (soit 439 masses d’eau)

Les principales cause du risque de non atteinte des objectifs environnementaux en 2027 sont :

  1. Les causes hydromorphologique* pour 43% des masses d’eau superficielles Normandie;
  2. Les phytosanitaires diffus provenant du ruissellement des parcelles agricoles;
  3. Les macropolluants ponctuels (incluant l’azote et le phosphore) issus de la érosion des particules du sol.

*Hydromorphologie recoupe à la fois les paramètres liés au régime hydrologique (débit, saisonnalité, connexion avec les eaux souterraines), ceux liés aux continuités écologiques (hauteur des obstacles, mobilité des espèces et des sédiments…), et les paramètres morphologiques (morphologie du lit mineur, hauteur d’eau, granulométrie du fond du lit mineur…)

Il est important de relever, qu’à ce jour, 124 masses d’eau aujourd’hui en bon état sont « en risque 2027 ». D’après l’état des lieux 2019 de l’Agence de l’eau Seine-Normandie, ces masses d’eau subissent aujourd’hui des pressions qui ne dégradent pas leur qualité au point de déclasser l’état. Cependant, il est estimé que l’évolution du contexte (le cumul des pressions, les tendances d’évolutions climatiques, la pression démographique) risque d’accroitre l’effet de ces pressions sur la qualité des masses d’eau

Pollution de la Seine par des macrodéchets (Photo: A. Dudouble)

Ce qu’il faut retenir

Selon les nouvelles règles de calcul utilisées pour l’état des lieux 2019, l’évaluation sur la période 2015-2017 conduit à une proportion de 42 % de masses d’eau de surface (masses d’eau cours d’eau, plans d’eau, côtières et de transition) en bon état (ou potentiel) écologique en Normandie.
L’évolution des méthodes d’évaluation ne permet pas la comparaison avec les évaluations des années précédentes. Cependant, en utilisant les anciennes règles d’évaluation et en les appliquant aux données de l’état des lieux 2019, nous constatons une amélioration de la proportion de masses d’eau de surface en bon état écologique à l’échelle du bassin Seine-Normandie (qui inclut une grande partie de la Normandie) depuis le dernier état des lieux de 2013.
Les paramètres déclassants les plus fréquemment rencontrés empêchant la masse d’eau d’atteindre ce bon état sont les paramètres biologiques (dont notamment l’indice biologique diatomées IBD), qui contribuent au déclassement de 39 % des masses d’eau normandes. Ces paramètres biologiques dégradés sont révélateurs des pressions qui pèsent sur les masses d’eau.
Les objectifs de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE) prévoient l’atteinte du bon (ou du très bon) état de 100 % des masses d’eau en 2027. Cependant, si aucune action supplémentaire n’est engagée en faveur de la qualité de l’eau, 70 % des masses d’eau normandes sont en risque de non atteinte des objectifs environnementaux en 2027, principalement du fait de pressions hydromorphologiques (rectification des cours d’eau, suppression des zones humides et des haies en bord de cours d’eau, obstacles à l’écoulement, etc.).

Pour en savoir plus, téléchargez la fiche complète de notre collection Indicateurs de Biodiversité Normandie consacrée à l’état écologique des masses d’eau de surface en Normandie

Iuna Thomas
Iuna Thomas
Chargée de mission scientifique – Analyse et traitement de données