les oiseaux d’eau hivernants

les oiseaux d’eau hivernants

Le froid de l’hiver pousse de nombreuses espèces d’oiseaux du Nord et de l’Est de l’Europe à migrer vers des régions au climat plus clément. C’est ainsi qu’en hiver de nombreuses espèces qui sont absentes (ou moins nombreuses) de la région pendant les autres saisons, sont davantage observables en Normandie. Le nombre et la diversité des oiseaux qui nous rendent visite varient d’une année à l’autre selon les conditions météorologiques et alimentaires dans les pays dont ils sont originaires. C’est essentiellement sur et autour des plans d’eau et sur le littoral de notre région que la halte ou le passage des oiseaux hivernants se manifeste dans toute son ampleur et sa variété. En effet, c’est généralement par centaines (voire par milliers) que canards siffleurs, fuligules milouins et morillon, sarcelles d’hiver, grèbes huppés, foulques macroules… peuvent être observés entre décembre et février.

Chiffres Clés :

93 espèces d’oiseaux d’eau hivernants sont observées en Normandie;
Environ 500 000 oiseaux d’eau hivernants sont présents en Normandie par an;
4 sites d’importance internationale pour l’hivernage des oiseaux d’eau dans la région;
3 sites normands accueillent tous les ans plus d’1% de la population hivernante française d’anatidés, de foulques et de limicoles côtiers;

Les résultats présentés proviennent uniquement des séries de données recueillies annuellement dans le cadre de l’enquête standardisée « Oiseaux d’eau en janvier » ce qui permet des comparaisons d’échelles.
En Normandie, ces suivis standardisés sont réalisés par de nombreux bénévoles et des structures telles que les Parcs Naturels Régionaux, les Réserves Naturelles Nationales, l’Office Français de la Biodiversité…

« Wetlands International » – Qu’est ce que c’est ? Il s’agit d’une organisation qui s’intéresse à la protection et à la gestion des zones humides dans le monde. Elle a été fondée en 1954 au Royaume-Unis avec l’objectif de protéger les oiseaux d’eau. Elle développe des programmes de suivi quantitatifs des oiseaux d’eau en organisant un décompte annuel des oiseaux d’eau à la mi-janvier dans 45 pays.
En France, c’est grâce aux données recueillies dans le cadre de ce suivi qui a permis de connaitre les lieux de stationnements effectifs des oiseaux, que l’essentiel des réserves de chasse sur le domaine public maritime ou fluvial a pu être créé. Ce travail permet également de faire progresser la liste des espèces protégées.

139%

c’est le taux de progression des oiseaux d’eau hivernants en France entre 1980 et 2020*

Pourquoi un suivi mi-janvier ?
A cette époque de l’année les populations d’oiseaux sont assez stables géographiquement. La sélection naturelle (liée pour partie à la migration postnuptiale) et l’essentiel des prélèvements cynégétiques ont déjà été réalisés. Ainsi les effectifs comptés à cette période représentent les futurs nicheurs.

*Ce chiffre est issu de l’indicateur national sur l’évolution des populations d’oiseaux d’eau hivernants développé par l’Observatoire National de la Biodiversité

Répartition des oiseaux d’eau hivernants à l’échelle régionale

En Normandie, la répartition des espèces varie en fonction des conditions d’accueil, ainsi certains secteurs de la région présente une spécificité pour certaines espèces :

  • La Seine Maritime joue un rôle d’importance pour les oiseaux marins : plongeons, grèbes, fou de Bassan, alcidés, cormorans
  • La Manche quant à elle se singularise par ses vastes zones humides et ses côtes basses qui accueillent beaucoup de grands échassiers, des canards de surface, des canards marins, des limicoles et des laridés
  • L’Eure (ainsi que la Seine-Maritime) accueillent des populations importantes de foulques et de fuligules au niveau de leurs anciens sites d’extraction de granulats
  • L’Orne, de façon générale accueille moins d’oiseaux d’eau que les autres départements normands.
Grand cormoran – Photo Romain MATTON

Sur la trentaine de sites fonctionnels* de Normandie, 15 sites accueillent 95% des oiseaux d’eau hivernant présents dans la région. Les 3 plus importants étant : La Baie du Mont-Saint-Michel (28%), la Baie des Veys (12%) et la vallée de la Seine (11%)
*entités géographiques suivies lors de l’enquête Wetland.

Quelles tendances à l’échelle régionale et nationale ?

Sur les 93 espèces d’oiseaux d’eau suivies au cours des 40 dernières années :

  • 35 ont vu leur effectif croitre au cours des 40 dernières années (soit 38% des espèces suivies) ;
  • 16 espèces ont des effectifs stables (17%) ;
  • 11 espèces présentent un déclin plus ou moins marqué de leurs effectifs (12%) ;
  • Les 31 espèces restantes soit 1/3 des espèces suivies présentent des effectifs trop faibles et/ou trop fluctuants pour que des tendances significatives se dégagent à l’échelle régionale.
39

espèces d’oiseaux d’eau hivernants sont qualifiées d’espèces « à enjeux » en Normandie

Ceci car leurs effectifs régionaux sont :

  • soit supérieurs à 10% pour les espèces sur le littoral (le littoral Normand représente 10% du littoral français) ex : Tournepierre à collier, bécasseau sanderling, goéland brun…;
  • soit supérieur à 5.5% pour les autres espèces (la Normandie représente 5.5% de la superficie de la France) ex : Cigogne blanche, Grèbe huppé, sarcelle d’hiver… ;
    Ces effectifs font ainsi de la Normandie une région d’importance pour la préservation de ces espèces
Grèbe huppé – Podiceps cristatus (Photo: Romain MATTON)
Cigogne blanche – Ciconia ciconia (Photo: Romain MATTON)

Un point sur les statuts de conservation

Sur les 93 espèces d’oiseaux d’eau hivernants pris en compte dans cette analyse, 44 espèces présentent un statut de conservation défavorable (CR, EN, VU) en période d’hivernage :

  • 19 espèces En Danger Critique (CR)
  • 11 espèces En Danger (EN)
  • 14 espèces Vulnérables (VU)

26 espèces font l’objet de mesures spéciales de conservation à l’échelle européenne (ZPS);
1/3 des espèces se trouvent dans un état de conservation défavorable et nécessitent l’adoption de mesures de sauvegardes et de gestion selon la convention de Bohn *;
Enfin, 31 de ces espèces sont chassables dont 3 espèces classées comme vulnérables à l’échelle mondiale : la macreuse brune, l’harelde boréale et le fuligule milouin !
*convention de Bonn est un traité international signé en 1979 qui vise à protéger les espèces animales migratrices pour lequel la France a adhéré en 1990.

Commentaire général

La Normandie accueille tous les ans plus de 500 000 oiseaux d’eau en période hivernale.

3 sites fonctionnels Normands sont d’importance nationale ! Ils concentrent annuellement plus de 1% des populations d’anatidés, de foulques et de limicoles hivernants présents sur le territoire français. La Baie du Mont-Saint-Michel et la baie des Veys présentent des effectifs stables tandis que les marais du Cotentin et du Bessin présentent une croissance modérée.

La Normandie héberge également 4 sites d’importance internationale ! Ils accueillent plus d’1% de la population biogéographique de référence:

  • la Baie du Mont-Saint-Michel site d’importance pour la Bernache cravant, le Pluvier argenté, le Bécasseau maubèche et le Bécasseau variable;
  • la côte ouest de la Manche pour la Bernache à ventre clair et le Bécasseau sanderling;
  • des Marais du Cotentin et du Bessin pour le Canard souchet;
  • et du Littoral Seino-Marin pour l’hivernage du Goéland marin;

30 espèces d’oiseaux d’eau hivernant concentrent en Normandie plus 10% des effectifs nationaux et 16 d’entre elles plus de 1% de leur population biogéographique de référence* !

Il est important de noter que ces espèces bénéficient, depuis quelques décennie, de mesures de protections qui leur permet de résister un peu peu mieux au déclin qui est observé chez de nombreuses espèces plus « ordinaires ». Toutefois, encore aujourd’hui, ces espèces occupent souvent des milieux fortement anthropisés (littoral, zones humides… ) et 1/3 d’entre elles sont des espèces qui sont chassables en France.

Enfin, même si l’enquête Wetlands « Oiseaux d’eau en janvier » permet de produire des indicateurs fiables pour de plus en plus d’espèces, certaines espèces devraient néanmoins faire l’objet de suivis spécifiques plus réguliers (des plongeons, des grèbes, des cormorans, des grands échassiers, des limicoles continentaux, des laridés et des alcidés).

Pour en savoir plus, téléchargez la fiche complète de notre collection l’état des lieux des connaissances naturalistes régionales consacrée aux oiseaux d’eau hivernants

Groupe Ornithologique Normand
GONm